#27: L'erreur humaine n'est pas une cause racine
Quand une personne se trompe, il y a une raison. La chercher et la prévenir est bien plus efficace que de se contenter de reprocher l'erreur.
Salut à toi,
bienvenue à ce 27ème Rendez-vous Qualité, nous sommes désormais 2806! 🤩
Je remercie le sponsor de cette édition qui permet de garder la newsletter gratuite pour les lecteurs:
CountAct, votre application des gestions d'alertes au quotidien.
Qu'il s'agisse d'un presqu'accident ou d'un malaise, l'application permet de gérer l'incident, de mobiliser des fiches réflexes adaptées et de faire du Retour d'EXpérience sur les incidents pouvant survenir au quotidien.
Prenons le temps d'échanger.
Si ce n’est pas déjà le cas, voici comment je peux t’aider:
Le Village QSE: la communauté pour échanger et te sentir moins seul.
Conseil en ligne: l’accompagnement individuel sur tes problématiques.
Mission Qualité: le programme collectif pour t’améliorer et t’épanouir dans la fonction qualité/QSE. (Prochaine session printemps 2024)
Memes QSE: télécharge tous mes memes en format modifiable.
Le sponsoring: promeut ton entreprise auprès des lecteurs du Rendez-vous Qualité.
Allez hop, c’est parti!
Temps de lecture : 8 minutes
Au sommaire:
L’actualité
La question de la semaine
L’erreur humaine n’est pas une cause racine
L’actualité
Le 8ème Live QSE sur Linkedin avec Anthony Deles a eu lieu ce mardi. Quel plaisir de refaire ce format! Le dernier remontait à juin 2023 et ça nous avait manqué. On a retrouvé ce terrible stress des 5 minutes avant que ça démarre… Le trac! 😅 Puis une fois que c’était parti, on était comme des poissons dans l’eau!
Une légère déception concernant le nombre de participants. Vous étiez 35 en moyenne, alors que sur les Lives QSE de 2023 c’etait plutôt 80-100 voir même 150. Je pense qu’avec la régularité des prochains Lives QSE (oui, oui, il y en aura d’autres) nous devrions retrouver notre audience.
Bref, pendant une heure nous y avons parlé des sujets suivants:
Révision de l'ISO 9001: ce qui ne change pas et ce qui devrait changer
Différences entre approche processus et approche par les risques?
La direction peut-elle déléguer son leadership ?
Recourir aux sanctions pour favoriser l'implication ?
On a aussi fait une visite guidée du Village QSE.
Et le mieux, c’est que tu peux voir le replay à deux endroits, au choix:
L’autre info c’est que vous êtes de plus en plus nombreux à me suivre et j’en suis ravi! Concrètement vous désormais 30 000 abonnés sur Linkedin et vous devriez être 3 000 inscrits au Rendez-vous Qualité d’ici la fin du mois. Au delà de chiffres (des indicateurs^^) vous êtes surtout chacun une personne qui trouve un intérêt à me lire. A chaque fois que j’y pense, ben, ça m’épate. 😅 Merci et continuons d’avancer et de grandir ensemble!
La question de la semaine
Chaque semaine je répond à une question de lecteur(rice). Si toi aussi tu souhaites me poser une question, ça se passe ICI.
Bonjour Benoit,
Concernant le signalement des incidents ce qui me pose problème c’est le fait que dans mon entreprise ce sont les personnes qui créent ces incidents qui sont censées les signaler…. Par exemple: de la casse dans un carton de livraison ou un oubli dans la commande qui est reporté par le client à celui qui a oublié le produit.
Il y a donc deux problèmes :
- la personne qui signale va avoir peur d’avoir le reproche d’avoir oublié le produit: quel intérêt pour lui de le signaler ?
- si on encourage les personnes à signaler par une récompense et que c’est la personne récompensée qui « est responsable par inadvertance » l’incident cela devient incohérent ;-)
Merci d’avance pour votre retour
Nathalie
Merci pour ta question Nathalie. Elle m’a été posée en réponse à la newsletter précédente (à relire ici si tu l’as ratée) et je vais donc répondre aux deux points.
La bonne question à se poser serait plutôt: quel est l’intérêt pour l’entreprise à ce que les personnes qui detectent une anomalie la signalent? C’est d’éviter les conséquences associéees. Cette question doit absolument être indépendante de la cause de l’anomalie! Concrètement, si des produits sont abimés dans un carton prêt à être livré, l’intérêt de l’entreprise c’est de le savoir afin de ne pas les fournir à son client! Donc, qui que ce soit qui le signale: on le remercie! Et on incite les collabortaeurs à le faire, avec les conseils donnés la semaine dernière.
En lisant tes questions, j’ai réalisé qu’il y manquait quelque chose. Un préalable à tous les conseils qui j’y ai assemblés. Etablir un climat de confiance. Celui qui signale un incident, doit savoir qu’il ne risque rien en le faisant! Sinon évidément, c’est humain, il va chercher à se protéger et ne le signalera pas.
Et donc, cela doit être établi très clairement côté management (en partant de la direction): pas de reproches! Point.
Pourquoi: parce que l’erreur humaine n’est pas une cause racine! (Oui, le sujet d’aujourd’hui a été influencé par les questions de Nathalie 😉). Une personne qui génère un incident l’a fait pour une raison.
Un manager ne devrait pas rechercher un coupable, il devrait chercher à comprendre pourquoi l’incident à eu lieu et agir pour éviter qu’il ne se reproduise. Or faire des reproches, ça n’y contribue pas! Pire, ça incite à ne plus signaler.
Le seul cas qui fait exception, c’est l’erreur volontaire, répétée, qui tend à se rapprocher plutôt du sabotage ou de la faute professionnelle et donc devrait déclencher un processus d’avertissements pouvant mener à sanction. Mais un processus de ce type doit être encadré, justifié, formalisé.
Enfin concernant les incitations au signalement, comme les récompenses, une fois de plus, le postulat de base est que non, sauf erreur volontaire, les personnes ne sont pas responsables des incidents. Il y a d’autres causes. Et même si elles auraient pu éviter l’erreur, l’entreprise préfère toujours et encore que l’incident soit signalé et ses conséquences évitées. Donc on peut maintenir les incitations par récompenses.
J’ajoute tout de même une nuance. Récompenser les signalements ne signifie pas forcément récompenser “tous” les siganlements. On peut définir des critères de types d’incidents qu’on intègre dans ce système, comme le niveau d’impact client, les coûts évités ou la probabilité de détection de l’incident.
On peut aussi se contenter de récompenser uniquement les meilleurs sur une période de temps comme le mois ou le trimestre, afin de s’assurer de donner plus de valeur et de reconnaissance aux signalements les plus significatifs.
L’erreur humaine n’est pas une cause racine
Suite aux questions de Nathalie, je me suis souvenu de certaines analyses de causes suite à non-conformité en audit, dont les 5 pourquoi se terminaient ainsi:
Cause: erreur humaine
Action corrective: sensibilisation
Et puis la non-conformité se reproduisait.
Pour la simple et bonne raison qu’on était pas allés au bout de l’analyse.
Analyser les causes
J’ai un scoop: non, l’erreur humaine n’est pas une cause racine parce qu’elle a elle même des causes, qui peuvent évidémment varier d’une situation à une autre.
D’ailleurs je t’invite même à partir du principe que ce n’est pas une erreur, mais plutôt une action réalisée ayant conduit à un incident ou une non-conformité.
Donc la bonne attitude c’est de se demander pourquoi l’erreur a eu lieu. Chercher le déclencheur, ce qui a rendu possible ou favorisé la réalisation de cette action non prévue.
Ces causes peuvent prendre plusieurs formes, voyons les plus courantes et les questions qu’ils convient de creuser:
Inadéquation avec le poste occupé
Est-ce que la personne occupe un poste pour lequel elle dispose des aptitudes nécessaires? Est-elle titulaire du poste? Etait-ce son poste habituel?
Manque de clarté des instructions
Est-ce que les modes opératoires, supports, informations dont disposent la personne sont réellement compréhensibles par elle? Disponibles? Accessibles?
Ergonomie du poste de travail
Est-ce que le poste de travail est rangé (5S), organisé dans une logique de prévention des incidents? Les espaces permettent-ils une bonne circulation? Des manutentions fatiguantes et répétées faisant baisser le niveau d’attention?
Méconnaissance des produits
La personne sait-elle ce qu’elle fabrique? Quelles caractéristiques sont importantes pour que le produit fonctionne? A quoi sert cette vis qu’elle doit positionner?
Manque de compétence
La personne a-t-elle était formé spécifiquement pour les tâches qu’on attend d’elle? Si oui, la formation a-t-elle été efficace? L’a-t-on vérifié?
Ignorance des risques
La personne est-elle informé et a-t-elle conscience des conséquences en cas d’erreur ou d’incident? Les comprend-elle? Sait-elle pourquoi c’est important?
Travail dans l’urgence
Les conditions habituelles de travail sont-elles réunies? Y a-t-il des éléments perturbateurs, comme une demande urgente, de la pression pour travailler plus vite?
Erreur volontaire
La personne est-elle en conflit avec un collègue? Avec son manager? Y a-t-il un historique de problèmes? La situatione est-elle connu et gérée au niveau RH?
Tant de possbilités… Et pour chacune, si elle est avérée, on peut poursuivre le questionnement.
Comment prévenir l’erreur humaine?
Regardrons maintenant plus en amont. Peut-on éviter qu’une action humaine soit génératrice d’un incident?
Soyons francs: évidement que le facteur humain présente des risques d’erreur. C’est normal, nous ne sommes pas infaillibles.
Mais la démarche globale de prévention qualité, si on regarde la logique d’une AMDEC (Analyses des modes de défaillance et de leur criticité) par exemple, c’est d’envisager les problèmes qu’on pourrait rencontrer, puis d’évaluer leur impact, la probabilité qu’ils ne survienent et notre capacité à les détecter.
Ensuite, en commençant par les plus critiques, de déterminer les enchainements d’évènements qui pourraient conduire à la survenue du problème. Et ces enchainements sont multiples.
La prévention consiste alors à travailler sur ces évènement pour réduire la probabilité de déclenchement et de réalisation, et de fait celle d’apparition des problèmes.
Pour les machines par exemple, on va étudier la fiabilité de fonctionnement et la capabilité, puis chosisir des équipements compatibles avec les performances souhaitées. Ensuite pour prévenir l’apparition de pannes on va organiser des actions de maintenance préventive et des vérifications périodiques.
C’est la même chose pour les systèmes de mesure: en faisant des études de répétabilité et de reproductibilité, on peut quantifier le niveau de confiance qu’on est capables d’obtenir dans les mesures. Si celui-ci n’est pas satisfaisant, on va travailler à l’améliorer, peut-être en changeant d’équipement de mesure ou mode opératoire.
Et c’est encore la même chose pour le facteur humain. Quels sont les risques associés au facteur humain sur mon processus de fabrication, de manutention, de préparation de commande, de livraison? Est-il compatible avec le niveau de performance souhaité? Si non, quelles mesures déployer pour réduire ce niveau de risque?
Ca peut prendre la forme de systèmes anti-erreur (poka yoke), d’aménagement du poste de travail, d’outillages adapté ou facilitant, de double contrôle, de formation renforcée associée à une habilitation, de reduction de la cadence ou encore d’automatisation…
Au final, l’humain peut se tromper et se trompera. La question est de savoir si le niveau de probabilité qu’il se trompe est acceptable sur les actions qui lui sont confiées, et si ce n’est pas le cas de mettre en place une organisation et des moyens visant à réduire cette probabilité.
Puis lorsqu’il est à l’origine d’un incident, on ne le lui reproche pas! On reprend les faits, on cherche leurs causes, on les compare à la manière dont le risque a été évalué et on cherche à identifier ce qu’il est possible d’améliorer pour ne pas que celà se reproduise.
On s’arrête là pour aujourd’hui!
A la prochaine,
Benoit
PS: si tu connais quelqu’un qui apprécierait de me lire, fais lui suivre ce mail. 😉